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21 août 2021

 De l'usage des MOTS

J'ai relevé comme une des principales menaces touchant l'Humanité la disparition du Langage.

Cette menace est évidente si l'on considère la place qu'a prise depuis le XVIIe siècle l'Image dont la croissance a été continue pendant près de trois siècles et est devenue exponentielle depuis un siècle. J'ai traité de cette question dans mon ouvrage Image ou Langage ? en partant de l'interdit de l'Image présent dans la plupart des religions et constituant non pas un des dix commandements mais le deuxième commandement. Les dernières grandes manifestations de l'opposition à l'image en Occident ont été l'oeuvre des protestants au XVIIe siècle, notamment des Calvinistes. Ce ne sont pas les développements technologiques de la gravure, de la photo, du cinéma et de la télévision qui ont entraîné la prépondérance de l'Image, c'est au contraire le primat donné à l'Image qui a amené les découvertes technologiques nécessaires à sa réalisation.


Je voudrais souligner un autre aspect de la disparition du Langage, interne à celui-ci : la disparition du sens des mots. Comme si les mots n'avaient pas de sens en eux-mêmes mais n'avaient que celui qu'on leur donne en fonction des buts que l'on poursuit. Les mots constituant le Langage subissent ainsi une mutation qui les transforme en simples signes. Du symbole on passe au signe, du langage à l'image-mot. C'est la langue elle-même qui se transforme de l'usage du SYMBOLE et de ses multiples jeux qui constituent la Pensée, en un catalogue de quelques centaines de SIGNES ou images-mots. La différence entre l'un et l'autre est que le signe renvoie directement à l'objet qu'il désigne alors que dans le symbole, la représentation est arbitraire. La preuve : différentes langues désignent de manière totalement différente le même objet ou la même réalité. Cet écart est fondamental dans la naissance de la PENSEE humaine. L'abolir revient à dire que l'humain peut (ou doit) vivre sans penser, ce qui revient à dire qu'il n'est plus Humain en tant que tel mais simple animal raisonnant, calculant.

Ceci est une des données particulièrement évidentes de la crise sanitaire actuelle dont le parcours peut être décrit par quelques mots-images : pandémie - confinement - masque - test - vaccin - passe sanitaire - variant, liste non exhaustive qui se terminera sans doute, non par la mort du virus ni par celle de l'espèce mais par le vivre avec par lequel on aurait pu (dû) commencer non en invitant (forçant) les humains à suivre des signes, mais en les amenant à penser, tout simplement, à développer leur bon sens non par des mots d'ordre mais par une sagesse. Ce qui eût évité les situations ubuesques que nous avons vécues et que nous vivons encore.

Ainsi le mot VACCIN est aujourd'hui la principale image-mot qui oppose les humains en deux camps : celui qui suit la bannière et celui qui la refuse. Opposer pour mieux régner est une des principales recettes du Pouvoir. Et on y arrive d'autant mieux que tant d'un côté que de l'autre, c'est l'absence de pensée qui domine. Et c'est sans doute cela le plus inquiétant aujourd'hui, bien plus qu'une quelconque mise au pas selon les uns, ou l'irresponsabilité des autres.

Le mot VACCIN a son origine dans une découverte de la fin du XVIIIe siècle. En inoculant volontairement aux humains le virus de la vaccine (propre à la vache, aux bovins), on favorisait chez eux la production d'anticorps les protégeant de la variole. Celle-ci fut un fléau de l'humanité pendant des millénaires. Par la suite on fit usage du même procédé pour d'autres maladies très graves qu'on réussit même à éradiquer en rendant la vaccination obligatoire : tuberculose, poliomyélite, diphtérie. Ce qui justifie le côté obligatoire de certains vaccins. Le mot VACCIN gardait son SENS même s'il ne s'agissait plus de la vaccine contre la variole. C'est là le propre de la pensée humaine dont un des fondements est l'analogie.

Plus récemment, on a étendu le mot VACCIN à tout type d'injection destiné à protéger l'humain de certains types de maladie ou tout simplement à renforcer son système immunitaire, en privant ainsi le mot de tout son SENS. C'est ainsi qu'on pseudo-vaccine contre la grippe, ce qui est une pratique impossible dans la mesure où le virus de la grippe mute en permanence. La vaccination va "marcher" si le virus a peu muté d'une année à l'autre ou si les mutations les plus importantes se sont produites suffisamment tôt dans l'autre hémisphère pour qu'on ait pu adapter le vaccin. On adjoint donc au produit injecté des éléments destinés à stimuler l'immunité. Il en est de même pour le coronavirus, avec cette différence qu'il ne s'agit pas d'un virus saisonnier qui fait le tour de la planète pour se développer en hiver, mais d'un virus dont on ne connaît pas les conditions de développement.

On a ainsi développé sous le mot "vaccin" toute une série de pratiques qui n'ont plus rien à voir avec la vaccination. Une des dernières est celle des désormais célèbres ARN messagers, découverte importante dans la compréhension de la manière dont l'ADN agit sur nos cellules. On connaissait l'hérédité, les chromosomes (mot apparu vers 1890), les gènes (mot apparu en 1909), gènes constitués de chaînes d'ADN. C'est dans les années cinquante que les travaux des biologistes ont porté sur la manière dont ces gènes agissaient sur nos organes. Une description vivante et accessible de ces recherches a été donnée par François Jacob dans son ouvrage La statue intérieure, autobiographie dont la partie la plus intéressante concerne cette question qui l'a amené à recevoir, conjointement à son patron, le Prix Nobel. Cette recherche apparaît comme une sorte de poursuite d'un élément X mal défini dont les biologistes découvrent peu à peu les propriétés et qu'ils finissent par cerner en lui donnant alors le nom d'ARN messager. Les recherches pratiques, technologiques sur l'emploi de cette découverte scientifique ont démarré environ trente ans plus tard et mené entre 2000 et 2020 à plusieurs essais cliniques concernant notamment la rage, le paludisme, le SIDA et le cancer. Il n'y a à ma connaissance jamais eu de campagne de TEST suite à ses essais cliniques..

"Treize patients s’étaient vu administrer un vaccin anticancer à ARN messager, avec des résultats encourageants, rapporte par exemple une publication scientifique en 2008. Depuis, de nombreux autres essais sur l’homme ont été menés, et les vaccins à ARNm sont considérés depuis les années 2010 comme l'avenir de la vaccinologie. Les grands progrès réalisés depuis une quinzaine d’années sur l’ARNm (en termes de stabilité, d’immunogénicité ou de conception du « véhicule » de l’ARN) ont permis de multiplier les candidats-vaccins. En 2017, on comptait déjà sept essais cliniques sur de tels vaccins contre des maladies infectieuses (ciblant le VIH, le virus de la rage, le virus Zika et la grippe), et près d’une soixantaine contre différents cancers. Les résultats contrastés et la complexité de formulation de cette technique ont conduit une partie des laboratoires pharmaceutiques à s’en détourner..." (Le Monde, 28 mai 2021)

Mais revenons à nos moutons : le mot VACCIN a été utilisé abusivement pour une raison : si l'on parlait à la fameuse opinion publique de toucher à tout ce qui se rapproche tant soit peu de nos gènes, cela provoquerait une levée de boucliers. On a donc profité de l'épidémie de coronavirus pour introduire une thérapie non pas génique mais touchant de près au mécanisme de fonctionnement de nos gènes, et cela sous le nom de vaccin, un mot "acceptable" par l'opinion publique. Voilà le but de l'utilisation de ce mot : faire entrer dans l'esprit des "gens" (un mot sur lequel il faudrait aussi revenir longuement) que les thérapies géniques sont l'avenir de la médecine. On emploie donc ce mot pour sa simple efficacité en tant que SIGNE. Plutôt que d'être l'instrument principal du développement de la PENSEE, il fait obstacle à la Pensée, mais remplit le rôle assigné au mot-image : rassembler l'opinion publique sous une bannière. Le mot, qui était le propre du Sage, est ainsi devenu l'instrument du manager. Il n'est pas vaincu par l'image mais mort en lui-même.

Le développement de l'écologie est aujourd'hui un lieu privilégié de cette mutation du mot en signe. Peu importe pour les "verts" si ce qu'ils racontent a du sens et un quelconque rapport avec la vérité, du moment que cela nous mène vers le nécessaire "changement de société", le passage de l'hyperproductivisme et de l'hyperconsommation vers une société verte, durable. Un projet intéressant en soi. Ceux qui pratiquent ce type de basculement du mot en mot-image ne le font pas toujours par mauvaise foi, ils peuvent même être guidés par des objectifs louables. Il n'empêche que leur attitude contribue à cette disparition de la Pensée. Leur propagande peut sans doute mener l'humain à vivre mieux dans la nature... mais le mène certainement à cesser de vivre en tant qu'humain !

Il n'y a rien de simple dans le mot. Non ?

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